
















Vidéo Installation ( 2025 )
Images sur deux canaux, Raspberry Pi 4
Durée de la vidéo, environ 5 mins
Cette installation vidéo, ancrée dans la culture locale de Göteborg en Suède, interroge la façon dont l'identité individuelle est réglée par l'entrelacement de l'environnement naturel et de l'éthique historique.
En Suède, le soleil de haute latitude transforme les fenêtres en miroirs sans tain durant le jour. Les rez-de-chaussée sont dotés de très grandes fenêtres sans aucun obstacle, afin de laisser pénétrer la lumière à l'intérieur. Cette pratique collective m'amène à réfléchir sur le lien entre le comportement social et l'être-ensemble. On peut y voir la prolongation implicite de l'éthique luthérienne.
L'accent protestant sur la transparence, le face-à-face direct avec Dieu et l'introspection, se superposant aux besoins de l'environnement naturel, a sédimenté, depuis le XVIe siècle, une esthétique sociale et une mentalité : des habitations ordonnées, des fenêtres non dissimulées, des communautés bien organisées sont perçues comme des symboles de confiance et d'égalité. Cette « dissimulation visible » en plein jour place l'individu sous le regard invisible de la communauté. Dans une perspective foucaldienne, cela forme un « panoptique bienveillant » où l'individu intériorise inconsciemment les attentes extérieures en une auto-surveillance, façonnant ainsi le sujet « suédois », caractérisé par sa retenue et son introspection.
L'installation se déploie sur deux canaux simultanés :
Écran Un (Boucle intérieure, à la fenêtre) : Présente les transitions quotidiennes d'un individu sous la lumière — une alternance entre la « dissimulation » diurne et l'« exposition » nocturne, où l'identité performe une convenance sous une discipline invisible.
Écran Deux (Métamorphose au bord de la mer) : Montre une femme Selkie accomplissant un douloureux rituel de mue au bord de l'eau, cherchant à se défaire de sa peau naturelle pour accéder à l'humanité. Son geste est à la fois rébellion et exil volontaire.
La juxtaposition de ces deux images crée un dialogue sur les racines de l'identité : Ce que nous cherchons à rejeter, est-ce une prison ou notre propre « patrie » ?
Les Mondes en Mouvement révèle in fine que l'identité n'est ni un don naturel unique, ni une pure construction sociale, mais une perpétuelle formation, superposée par la nature, la religion et la mémoire. L'œuvre invite le public à réfléchir, dans le vertige et la déchirure, à ce qui constitue notre « dernière peau » — celle que nous ne pouvons pas retirer.
