C'est une vidéo centrée sur les villages entourant la plus grande mine de phosphate du Maroc.Fruit de huit mois de recherche in situ, mon travail prend pour échantillon d’observation une zone d’érosion industrielle de deux kilomètres de rayon. À travers une captation en HDR, il met en place un triple système de contrastes visuels : l’opposition morphologique entre les infrastructures d’extraction mécanisée et le relief organique, le conflit chromatique entre la lumière froide industrielle et les teintes naturelles, ainsi que le décalage temporel entre le cycle biologique du bétail et les cadences de production de l’usine. Le paysage sonore multicanal superpose vibrations mécaniques, témoignages oraux en dialecte local et fréquences basses des activités animales, créant une expérience immersive qui donne à sentir l’intrusion du processus industriel dans la vie traditionnelle.

Adoptant une approche de « l’héritage toxique », ce travail révèle la dette écologique engendrée par l’exploitation du phosphate : ressource stratégique pour l’agriculture moderne et l’industrie nucléaire, son extraction prédatrice perpétue un modèle de dépossession postcoloniale, forçant les communautés locales à en subir les conséquences environnementales. L’image capture le paradoxe cognitif des habitants, à la fois dépendants des emplois offerts par l’usine et conscients des menaces pesant sur leur existence. Parallèlement, le bétail contaminé devient un indicateur biologique, établissant une chaîne de témoignages interespèces.